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Photo (RKM) de couverture du N° 327, prise à la Grotte Gutmanala près de Turaida en Lettonie.
Photo (RKM) de couverture du N° 327, prise à la Grotte Gutmanala près de Turaida en Lettonie.

Cinq mots sur la table de discussion
« Foi, Religion, Croyance »

Par R. Kirsch

En ajoutant Vérité et Dogmatisme au thème de ce numéro , Foi, Religion, Croyance, cela fait 5 titres sur la table de discussion. Par manque de place, ce texte n’a pu être inséré dans le bulletin LE SIGNAL, c’est pourquoi il est proposé ici à la discussion.

N’hésitez pas à vous exprimer sur ce thème en vous rendant à la fin de cet article. C’est une sorte de Courrier des lecteurs.

1 Foi

La foi peut-elle reposer sur l’intellect ou seulement sur le sentiment et l’émotion ? Jean-Paul II en 1998, dans Fides et Ratio (la foi et la raison), distinguant foi et croyance, mettait en avant l’usage de notre intelligence :  » la croyance c’est l’abandon de la raison, l’abandon de la foi cherchant l’intelligence « .

D’où vient-elle, est-ce un don ? Ma foi, je peux dire que pour moi, elle ne fonctionne pas en tout ou rien et son périmètre est mouvant. Elle ne cesse d’évoluer. Celle de mon enfance est enterrée depuis belle lurette et celle de la jeunesse est recouverte en partie par celle de l’âge mûr. Il s’en suit que ma foi personnelle est comme pour de nombreux croyants, je suppose, un ensemble de croyances diverses en Dieu, au surnaturel, en un idéal, à des dogmes. J’entends d’ailleurs fréquemment de nombreuses variantes personnelles sur le dosage entre la croyance en Dieu et la croyance ou non aux dogmes.

Que le contenu de ma foi et sa signification fasse l’objet de ma recherche spirituelle me paraît aller de soi comme quelque chose d’ordinaire ou de naturel. De même, j’ai la conviction profonde que je quitterai cette terre, sans beaucoup de certitudes, mais avec confiance, sans avoir compris grand-chose à ce qui m’attend ni à ceux qui m’attendent. Cela m’étonne d’ailleurs d’avoir ainsi confiance dans l’inconnu. Il y a une part d’optimisme aveugle, mais dans le fond, c’est moins surprenant si je considère que j’ai confiance en Quelqu’un que j’ai l’impression de connaître un peu par ses témoins.

Au moment où j’écris ces lignes, se tient du 18 au 24 août à Abondance, Haute Savoie, l’Université d’été des jeunes catholiques de Lyon sur le sujet de la foi. Il s’agit de les aider à y voir clair, à savoir où et comment trouver les réponses à leurs questions. Le Père Martin Charcosset, l’un des organisateurs, explique « ils [les participants] acquièrent un peu plus d’autonomie dans leur rapport à la foi, développent le goût de la recherche intellectuelle qui s’affranchit des réponses toutes faites« .

2 Religion

Qui dit religion, dit système institutionnalisé de croyances et de pratiques propres à la communauté qui y adhère. Croyances et religions sont associées pour se conforter les unes les autres. Cela a quelque chose à voir avec la notion de sacré. Mais alors que le terme sacré a un équivalent dans toutes les langues, sur tous les continents, il semble que le concept de religion, se réclamant d’universalité, n’est que strictement occidental, issu du bassin méditerranéen. La religion suppose la croyance en la révélation d’une Vérité éternelle et l’entretien d’une relation avec le surnaturel. Dans les religions monothéistes en particulier, elle se traduit par la croyance en un Dieu en qui on accorde sa confiance : la foi en

  1. Une révélation par les témoignages de l’expérience mystique et prophétique accumulés pendant des millénaires, ou par un messie.
  2. Une vérité éternelle débarrassée des styles de narration et des modes de pensée du moment. Vérité cachée transmise oralement et sous-jacente aux textes sacrés rédigés, recopiés, complétés, traduits et transmis par des générations d’hommes. Il n’y aura, pour moi, jamais de certitude absolue, ni de service clé en main, sans recherche personnelle.
  3. Une relation avec le surnaturel par une communion avec Dieu, avec les générations passées, dans la prière. La chrétienté a laborieusement diversifié et formalisé, comme elle a pu, ces pratiques au fil des siècles.

La traduction de mes croyances, de ma religion, de ma foi, c’est ma vie, c’est ma trajectoire. Je ne parle pas en votre nom, ni à votre place, mais vous avez la parole.

3 Croyance

Un besoin de croire au surnaturel ? Les croyances de l’Humanité au surnaturel me paraissent exister depuis la nuit des temps. Convictions non validées par la raison, issues de la confiance en la personne qui les transmet, faut-il les assimiler à un besoin social, un besoin fondamental de l’Homme au vu de sa fréquence ? Un besoin affectif attrayant pour beaucoup d’entre nous ? Il est vrai que chacun peut entretenir ses propres croyances, mais dès lors que l’on se rassemble entre personnes partageant les mêmes convictions, il est plus facile de les entretenir et elles semblent ainsi se renforcer.

C’est d’ailleurs un des problèmes majeurs des réseaux sociaux où des millions de personnes peuvent partager et diffuser une fausse rumeur. Elles y croient de plus en plus à mesure que le nombre des partages augmente et que le contenu corresponde à une idée qui leur convient ; on est aux antipodes de la vérité. Le phénomène étant bien connu et étudié, des lanceurs de fausses nouvelles s’en servent avec succès pour jeter le discrédit sur une information vraie qui les gêne.

4 Vérité

La recherche de la vérité est-elle encore à l’ordre du jour ? Jacques Bouveresse se demande « Est-ce une indifférence, devenue presque complète, à la question de la vérité qui vaut à la religion ce regain de sympathie et de prestige qu’elle connaît [dans certains milieux] plutôt qu’un désir plus grand de vérité ?  » Autrement dit la motivation, de beaucoup de demandeurs de spiritualité, ne serait pas la recherche de la vérité, mais le besoin d’une religion quelconque, combinée à une dose d’ignorance de ce qu’elle est, et d’indifférence envers son contenu doctrinal.

Il n’est pas évident de faire l’effort de s’expatrier pour bénéficier d’un système politique qui nous conviendrait mieux que celui du pays où l’on vit, mais aujourd’hui, pour changer de système de croyances (de vérités), chacun peut s’expatrier facilement dans un ailleurs en faisant librement son choix, au supermarché du spirituel. C’est devenu facile, même si c’est simplement pour s’essayer un moment à autre chose, le frein de la pression sociale, du qu’en dira-t-on ?, ayant disparu en occident.

Je pense pourtant qu’il y a quelque chose de plus profond pour ne pas dire inné dans cette curiosité superficielle. Les sciences et les religions, avec des objectifs et des moyens différents, cheminent sur les pistes du savoir, motivées par une identique quête de connaissance.

5 Dogmatisme

En termes simples c’est une vérité définie, proclamée, imposée ; circulez il n’y a rien à discuter. C’est en somme une solution de facilité, plus besoin de se casser la tête à réfléchir, d’autres s’en sont occupé avant moi. Les générations suivantes n’ont plus qu’à faire confiance aux générations précédentes.

Faut-il voir derrière cet abandon d’une recherche personnelle la peur de perdre quelque chose par la remise à plat de questions fondamentales ? Est-ce un découragement devant l’ampleur et la difficulté de la tâche ? Pourtant, il me semble que les dogmes proclamés par l’Église sont le fruit de croyances, d’inspirations, et de longues discussions à un moment donné, dans un contexte donné, sur des textes hérités, et une tradition orale transmise.

Beaucoup de choses ont changé depuis certains conciles fondateurs, le dernier en date a du mal à entrer dans les esprits. J’ai cru comprendre que cela va prendre un siècle au moins, comme pour les précédents. Sommes-nous réellement condamnés à accuser toujours plus de retard entre les attitudes dogmatiques officielles et l’évolution des pratiques de la vie ordinaire qui va de plus en plus vite ? Peut-être oui, mais la lenteur de la réflexion en profondeur pour aplanir des divergences inévitables est aussi un « garde fou » contre le « toujours plus vite » qui fragilise l’Homme et peut-être l’existence même de l’Humanité.

R. Kirsch, septembre 2017

Feuilleter le signal LE SIGNAL no 327 sur le thème « Foi, Religion, Croyance » :

SIGNAL_No327_sept_2017

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