Lien vers les lectures du dimanche 13 juillet
Aujourd’hui, l’Évangile nous présente l’une des plus célèbres paraboles de Jésus : celle du Bon Samaritain. Ce récit, à première vue, nous enseigne l’amour du prochain. Mais les Pères de l’Église, dans leur sagesse, ont vu bien au-delà. Ils ont reconnu dans cette parabole une image de l’histoire du salut, un résumé symbolique de l’Incarnation, de la Rédemption, et de l’amour miséricordieux du Christ pour l’humanité blessée.
« Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho. »
Les Pères ont vu en cet homme Adam, figure de l’humanité tout entière. Jérusalem représente le paradis, la communion avec Dieu. Jéricho, cité basse située en dessous du niveau de la mer, c’est même la citée la plus basse au monde, symbolise le monde du péché. Ce voyage est donc la chute de l’homme, sa descente spirituelle loin de Dieu.
Les brigands dépouillent l’homme, le frappent et le laissent « à demi mort ».
Cela évoque l’action du péché, qui blesse l’homme dans son âme, le prive de la grâce et le laisse à moitié mort – vivant selon la chair, mais mort spirituellement, incapable seul de se relever.
Le prêtre passe, puis le lévite, mais ils ne s’arrêtent pas.
Ils symbolisent la Loi de Moïse et le culte du Temple. Incapables à eux seuls de guérir l’homme. Car la Loi révèle le péché, mais elle ne sauve pas. Seul l’amour incarné peut relever l’homme blessé.
Et voici venir le Samaritain – un étranger, méprisé des Juifs – qui s’approche, est pris de compassion, et soigne les plaies.
Qui est cet étranger qui vient d’ailleurs, sinon le Christ Lui-même, Dieu fait homme, venu de loin pour s’approcher de nous, malgré notre misère ? Dans les vitraux de nos grandes cathédrales, à Bourges, à Sens, à Chartres, c’est bien ainsi que le Bon samaritain est représenté avec les traits et les attributs du Christ.
Il verse du vin et de l’huile :
- Le vin est le sang du Christ, versé pour notre guérison.
- L’huile évoque le Saint-Esprit, la douceur du sacrement de la guérison.
Il met l’homme sur sa monture – c’est-à-dire qu’il prend notre fardeau sur lui – et le conduit à l’auberge, l’Église, où il le confie à l’aubergiste, image des pasteurs.
Le Samaritain dit à l’aubergiste : « Prends soin de lui, et ce que tu dépenseras en plus, je te le rendrai à mon retour. »
C’est la promesse du Christ à ses ministres : nourrissez, soignez les âmes, jusqu’à mon retour glorieux. L’Église est le lieu du soin spirituel, des sacrements, de la miséricorde, un “hôpital de campagne”, selon le pape françois.
« L’auberge où le Samaritain conduit l’homme blessé figure l’Église dans ce temps présent ; mais elle est aussi la maison de Dieu, promise aux élus. Là, les blessures de l’âme seront définitivement guéries. Le Samaritain promet de revenir : ainsi le Seigneur reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts, et pour conduire les siens à la vie éternelle. » Bede le Vénérable.
À la fin, Jésus ne dit pas simplement : « Aime ton prochain », mais : « Va, et toi aussi, fais de même. »
Autrement dit, entrez dans cette logique du salut : devenez vous aussi de bons samaritains, à l’image du Christ. Reconnaissez-vous dans l’homme blessé, accueillez la guérison du Seigneur, puis soyez vous même porteurs de compassion pour les autres.
La parabole du Bon Samaritain, loin d’être un simple appel moralisateur à la bonté, comme cela est généralement entendu, est l’annonce du mystère de notre salut :
- Nous étions blessés,
- le Christ est venu,
- Il nous a relevés,
- Il nous soigne dans son Église,
- et Il reviendra.
Frères et sœurs, ne refusons pas la main tendue du Samaritain divin. Accueillons son vin, son huile, sa monture, son Église. Et devenons, à notre tour, témoins de cet amour miséricordieux qui sauve le monde.
Appendice : Les quatre sens de l’Écriture (lecture quadripartite)
Un passage biblique, surtout dans l’herméneutique médiévale, pouvait être compris selon quatre niveaux :
| Sens | Description | Exemple (parabole du Bon Samaritain) |
| Littéral | Le récit tel qu’il est raconté | Un homme est attaqué et secouru par un Samaritain |
| Allégorique | Sens théologique : que cela dit du Christ | Le Samaritain = le Christ qui sauve l’humanité |
| Moral (ou tropologique) | Ce que le texte enseigne à faire | Tu dois aimer ton prochain sans distinction |
| Anagogique | Ce que le texte dit sur la fin ultime, le salut | L’homme guéri est figure de l’âme sauvée, accueillie au Ciel |
Père Gabriel Ferone
Retrouvez les homélies du père Gabriel et du père Bertrand dans la rubrique « Messes et célébrations » / « Homélies des pères Gabriel et Bertrand » de ce site

Merci, Gabriel, pour cette lecture plus profonde qui m’éclaire le « Bon Samaritain » d’une lumière nouvelle.