Lien vers les lectures du dimanche 12 octobre
Jésus traverse la frontière entre la Samarie et la Galilée.
Dix lépreux viennent à sa rencontre : dix hommes exclus, marqués dans leur chair, rejetés par la société.
Ils crient : « Jésus, Maître, prends pitié de nous ! »
Ce cri, frères et sœurs, c’est le cri de l’humanité d’aujourd’hui.
Car nos lépreux, ce sont nos cœurs malades, nos âmes blessées par le péché, la peur, la fatigue intérieure.
Ces dix lépreux représentent les grandes maladies spirituelles qui rongent l’homme depuis toujours.
D’abord, les sept péchés capitaux, que les Pères du désert ont si bien décrits :
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L’orgueil, quand l’homme croit qu’il n’a plus besoin de Dieu.
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L’avarice, quand l’argent devient son seul maître.
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La luxure, quand l’amour est réduit au plaisir.
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L’envie, quand la jalousie éteint la joie.
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La gourmandise, quand le ventre et le cœur refuse toute limite.
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La colère, quand la haine remplace la justice.
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La paresse, quand on ne veut plus servir, aimer ni prier.
Ces péchés sont la lèpre ancienne, celle que Jésus guérit depuis toujours.
Mais notre monde souffre encore de trois formes nouvelles de lèpre.
L’acédie, du grec akēdía — “absence de soin” —, c’est la lassitude de l’âme, la fatigue du cœur.
Ce n’est plus seulement la paresse du corps, c’est le dégoût de vivre, la tristesse sans raison.
« À quoi bon ? » disent tant de personne aujourd’hui.
Ils vivent entourés d’écrans, mais sans présence ; connectés à tout, mais absents à eux-mêmes et au monde.
C’est le démon de midi dont parlaient les moines : en plein jour, tout semble vide, inutile, sans saveur.
C’est la dépression spirituelle de notre temps : quand la vie ne dit plus rien, quand l’espérance s’éteint.
Le nihilisme, c’est la maladie du sens.
C’est croire que rien n’a vraiment de valeur : plus de vérité, plus de bien, plus de beauté.
“Tout se vaut, donc rien ne vaut.”
On le voit dans la banalisation de la mort, dans le relativisme moral, dans la consommation sans but ou le cynisme des réseaux sociaux.
L’homme moderne ne croit plus en Dieu — mais surtout, il ne croit plus en rien.
Et c’est là sa plus grande misère : il a tout, sauf une raison de vivre.
Et voici la plus perverse de toutes : la haine de soi.
Quand un peuple ne croit plus en lui-même, il se punit.
Nous avons perdu la foi chrétienne d’autrefois ou on insistait et parfois trop sur le péché et la culpabilité, , mais nous avons gardés les réflexes de cette époque: nous faisons pénitence pour tout — pour le passé, pour l’histoire, pour le climat —, sans plus jamais célébrer le bien qui est en nous et le bonheur de vivre. .
Nous sommes devenus coupables de vivre!
La haine de soi, c’est la lèpre du cœur repu, qui ne sait plus se réjouir de ce qu’il est.
Mais que dirions-nous à une personne qui ne voit que ses défauts ?
“Regarde aussi ce qu’il y a de beau en toi !”
Et à celui qui pense à mourir ?
“Vis ! Respire ! Ce monde a besoin de toi ! ”
C’est exactement ce que fait Jésus avec les lépreux :
Il ne les condamne pas — il les relève.
Debout et marche !
Sur les dix guéris, un seul revient. Et c’est un Samaritain, un étranger.
Pourquoi lui ?
Parce qu’il n’a pas les mains pleines. Parce qu’il n’est pas prisonnier de son confort.
Les maladies de l’âme — orgueil, acédie, nihilisme, haine de soi — sont souvent les maladies des rassasiés, de ceux qui n’ont plus faim de Dieu.
Le Samaritain, lui, reconnaît la grâce.
Il revient, il tombe aux pieds de Jésus, il remercie.
Il ne cherche pas seulement la guérison du corps : il cherche la rencontre du Sauveur.
Et Jésus lui dit : « Ta foi t’a sauvé. »
Les neuf autres ont été purifiés ; lui seul est sauvé.
Notre monde a perdu le sens de la gratitude.
Il réclame tout, se plaint de tout, et ne remercie plus — car tout lui semble dû. Comme un enfant capricieux…
Mais remercier, c’est reconnaître qu’on n’est pas seul, qu’on n’est pas Dieu. C’est un baume contre toutes les lèpres de l’âme.
C’est le premier pas de la foi et de la guérison.
Quand tu te lèves le matin, remercie.
Quand tu vois la beauté du monde, remercie.
Quand tu reconnais tes faiblesses, remercie encore : c’est là que Dieu peut te guérir.
Les neuf sont partis contents ;
un seul est revenu heureux.
Puissions-nous être, nous aussi, celui qui revient vers le Seigneur.
Père Gabriel Ferone
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Bonjour, je trouve bien de pouvoir relire l’homélie. Cela me permet de mieux comprendre et de voir dans ma vie d’aujourd’hui où je peux me situer.
Je suis plein de gratitude,c’est important de voir le beau dans cette société où on ne nous montre que le négatif. Pourtant de belles choses se passent.
La solidarité est là.
Marguerite