Lien vers les lectures du 19e dimanche du temps ordinaire, dimanche 10 août
Servir, sans rien attendre
« Sois sans crainte petit troupeau, votre père a trouvé bon de vous donner le Royaume. Vendez ce que vous possédez, et donnez-le en aumône… »
Ensuite, prenez votre tenue de serviteur, et commencez à servir. La première condition du service est le dépouillement. Abandonnant ce qui pourrait me revenir de droit (cf. l’Evangile de dimanche dernier), je deviens capable de servir, sans désirer autre chose que la joie de servir.
Dès lors que je ne suis plus mon propre maître, ni maître de mes biens, je deviens dépendant du maître et réellement capable de servir.
Je sers alors mes frères avec les biens que Dieu me confie comme à un bon gérant. Ces biens ne sont plus les miens. Ils appartiennent au Seigneur, et ils sont orientés vers le don, vers le frère. Le rôle du gérant est de distribuer les biens aux frères, et non pas de faire de la discipline. Encore moins de profiter des biens pour soi-même.
De cette façon, nous pouvons vivre avec Dieu et devant Dieu. Cela a lieu ici et maintenant. Quand je sers mes frères sans rien attendre, sans même que je perçoive la grâce donnée à celui qui sert, alors j’ai abandonné mes propres biens, et je distribue les biens du maître, comme il me demande de le faire.
Père Bertrand Carron
Homélie du père Gabriel
La Lettre aux Hébreux nous offre aujourd’hui un véritable éloge de la foi. Elle nous dit :
« La foi est une manière de posséder ce qu’on espère, un moyen de connaître des réalités qu’on ne voit pas. » (He 11,1 – Écriture)
Et c’est par cette foi que les anciens – Abraham, Isaac, Jacob, Sarah – ont été de bons Témoins. Non parce qu’ils ont vu l’accomplissement des promesses, mais parce qu’ils y ont cru, contre toute espérance. Et c’est ici que commence pour nous une compréhension plus profonde de l’histoire du salut : ces patriarches de l’Ancien Testament ne sont pas de simples figures du passé. Ils sont des figures prophétiques, des préfigurations (gr. παραβολή – parabolē), qui annoncent le mystère du Christ et la venue du peuple de Dieu.
« C’est par la foi qu’Abraham, mis à l’épreuve, a offert Isaac ; et il offrait son fils unique, lui qui avait reçu les promesses, et à qui il avait été dit : “C’est par Isaac qu’une descendance portera ton nom.”
Il pensait que Dieu est capable même de ressusciter les morts ; c’est pourquoi il retrouva son fils, et ce fut une préfiguration. » (He 11,17–19, trad. TOB avec note sur figura – Écriture)
Le texte grec emploie ici le mot παραβολή, que l’on peut traduire aussi par figure symbolique, image prophétique. Isaac, lié sur le bois, devient figure du Christ. Sur la montagne du sacrifice, Isaac porte le bois, comme Jésus portera sa croix. Abraham monte, le cœur brisé, comme le Père contemple la Passion de son Fils. Mais là où Isaac est sauvé, le Christ va jusqu’au bout — par amour pour nous.
« L’enfant Isaac, mené au sacrifice, est une figure de celui qui s’offre librement pour le salut du monde. » (Origene).
Frères et sœurs, ces figures de l’Ancienne Alliance nous enseignent que Dieu prépare, par avance, dans l’ombre, la lumière du salut.
Quand Abraham quitte son pays, il le fait sans savoir où il va. Il avance seulement sur la promesse d’un Dieu invisible. Il devient ainsi pour tous les croyants le modèle d’une foi qui marche dans la nuit.
Et cette foi d’Abraham, en offrant son fils, annonce déjà la foi du Père offrant son Fils unique pour le monde. Ce n’est pas seulement un acte d’obéissance : c’est une prophétie, une préfiguration de la Passion, un type du sacrifice du Christ.
Dieu avait promis à Abraham une descendance : « aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que le sable au bord de la mer. » (Gn 22,17 )
Cette descendance, c’est nous. Non selon la chair, mais selon la foi.
Chaque baptisé devient en Christ fils d’Abraham. Nous sommes cette multitude d’étoiles spirituelles, nées non d’un sang ou d’un nom, mais de la foi dans le Fils de Dieu.
Et que dire de Sarah ? Elle aussi est une figure de foi. Elle a cru, malgré sa stérilité, que Dieu peut faire surgir la vie là où il n’y a plus d’espérance. Et ainsi, elle annonce l’Église, épouse stérile selon la chair, mais féconde selon l’Esprit.
Origène le dit avec poésie : « La foi de Sarah féconde l’histoire ; son rire, transformé en joie, annonce la naissance de ceux qui croiront à l’impossible. » (Homélies sur la Genèse, 4,4 – Commentaire patristique)
Le texte poursuit en disant qu’Abraham attendait : « la cité qui a de solides fondations, celle dont Dieu est l’architecte et le constructeur. » (He 11,10 – )
Cette cité, ce n’est pas Jérusalem selon la chair : c’est l’Église, bâtie sur le Christ, la pierre vivante, et orientée vers la Jérusalem céleste. Nous la voyons encore blessée, imparfaite, mais elle est déjà le commencement du Royaume.
Frères et sœurs, nous ne sommes pas simplement les lecteurs d’un récit ancien. Nous sommes les héritiers d’une promesse vivante. Ces récits, ces figures, nous concernent aujourd’hui. Nous sommes invités à marcher comme Abraham, sans tout comprendre, mais en croyant fermement. Nous sommes appelés à porter le Christ dans notre vie, comme Isaac portait le bois.
Nous attendons, nous aussi, cette cité aux vraies fondations, la Jérusalem céleste, où Dieu sera tout en tous. Que notre vie ici bas soit une préfiguration de celle qui nous attend au ciel.
Père Gabriel Ferone
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