Lien vers les lectures du dimanche 28 septembre
L’Évangile de Lazare et du riche est une parabole qui nous choque. Un homme riche, vêtu de pourpre et de lin fin, festoie chaque jour. Et devant sa porte gît Lazare, couvert d’ulcères, affamé, désireux de se rassasier des miettes qui tombent de la table. Mais personne ne lui donne rien. Seuls les chiens viennent lécher ses plaies.
Arrêtons-nous sur deux détails.
1. Le riche vêtu de lin
Luc précise que le riche portait du lin fin et de la pourpre. Le lin, dans la Bible, n’est pas n’importe quel tissu : c’est celui des vêtements sacerdotaux, celui que prescrivait la Loi pour ceux qui servent à l’autel. Autrement dit, ce riche n’est pas seulement un homme aisé : il est aussi l’image d’un homme religieux, qui observe les prescriptions rituelles. Et c’est peut-être au nom de cette pureté rituelle qu’il reste à distance du pauvre. Lazare est couvert de plaies, donc impur. Le riche, pour rester « pur », ne l’accueille pas. Mais cette fausse pureté devient une prison : son cœur est fermé.
2. Les chiens et la Syro-phénicienne
Le second détail, ce sont les chiens. Dans la parabole, ils s’approchent du pauvre Lazare et lui lèchent les plaies. Dans la tradition juive, le chien était un animal impur, méprisé, sans maitre, symbole des païens incapable de respecter la loi de Dieu. Souvenons-nous : dans l’Évangile, une femme syro-phénicienne, étrangère, une païenne supplie Jésus pour sa fille. Et Jésus lui répond durement : « Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants pour le donner aux petits chiens. » Cette femme n’a pas droit à la table d’Israël, parce qu’elle est païenne. Mais, dans son humilité, elle accepte : « Oui, Seigneur, mais les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres. »
Elle reconnaît sa condition, elle ne revendique rien, mais elle croit que même une miette de la grâce de Jésus suffit. Et Jésus lui donne ce qu’elle demande.
• Dans les deux récits, les chiens représentent les nations, les étrangers, ceux qui n’ont pas de place à la table des « enfants » d’Israël.
• La Syro-phénicienne mendie les miettes.
• Les chiens de Lazare lèchent ses plaies.
Dans les deux cas, ils montrent une attitude d’humilité et de proximité, là où les enfants repus — le riche, ou Israël symbolisé par lui — restent fermés.
3. Lazare figure du Christ
Les Pères de l’Église ont vu en Lazare une figure du Christ. Pauvre, rejeté, couvert de plaies, il est l’image de Jésus crucifié. Et les chiens qui viennent à lui sont les nations païennes, qui reconnaissent le Sauveur là où Israël officiel ne l’a pas reconnu. Les plaies que les chiens lèchent deviennent alors le signe de la grâce : les nations touchent le Corps du Christ et reçoivent sa vie.
Conclusion
Frères et sœurs, la parabole de Lazare n’est pas d’abord un conte moral sur la charité : elle nous met devant le mystère du salut.
• Le riche, attaché à ses vêtements de lin, croit rester pur mais il se ferme à Dieu présent dans le pauvre.
• Lazare, impur aux yeux de la Loi, est en réalité l’icône du Christ qui s’identifie aux humiliés.
• Les chiens sont paradoxalement les premiers à reconnaître et à s’approcher pour lécher ses plaies dans un acte de compassion.
Alors, qui sommes-nous ? Sommes-nous comme le riche, qui protège sa pureté et sa table mais ne voit pas le pauvre à sa porte ? Qui reste aveugle à son prochain et sourd à la compassion? Ou saurons-nous, comme la femme syro-phénicienne et comme ces chiens de la parabole, accepter notre petitesse, tendre la main pour recevoir ne serait-ce qu’une miette du Pain de Vie, et nous approcher des plaies du Christ présentes dans nos frères blessés ?
Le vrai festin n’est pas celui du riche. Le vrai festin, c’est celui où Dieu lui-même nous donne son Fils, Pain de vie pour le monde. Approchons-nous, comme des mendiants, humbles et pauvres, et recevons la grâce qui nous sauve..
Père Gabriel Ferone
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